« Intégrer une personne handicapée dans l’entreprise c’est afficher une ambition » Damien Seguin

Damien Seguin, skipper médaillé paralympique des jeux d’Athènes et de Pékin, capitaine de l’équipe de France des jeux de Londres, invité par Face Loire-Atlantique le 24 février 2015 à Montoir de Bretagne.

 

« Je m’appelle Damien Seguin, mais mon deuxième nom c’est agénésie congénitale. C’est mon handicap qui me vaut ce nom scientifique, c’est ma boîte à moi, que l’on insère dans une plus grande dans laquelle on met toutes les personnes handicapées.

 

Je suis né sans main gauche, dès la naissance j’ai donc appris à vivre avec ce handicap, ce qui est différent d’une personne qui est handicapée à la suite d’un accident et qui doit réapprendre les gestes de la vie quotidienne. Moi, au moins, dans la famille des handicapés, on peut quand même dire que j’ai de la chance.

 

Dans le monde sportif comme dans le monde de l’entreprise, on a souvent du mal à associer les mots handicaps et performances. Pourtant, beaucoup d’exemples, notamment dans l’univers paralympique, montrent que ces 2 mots sont compatibles.

 

Dans le monde de l’entreprise, sans généraliser la pensée collective, beaucoup considèrent qu’une personne handicapée est plus fragile, plus fatigable, plus lente, car elle doit accomplir sa mission en entreprise tout en surmontant son handicap. A priori, si on part de ce constat, intégrer une telle personne est source de contraintes. Mais est-ce que cette contrainte s’oppose à une réelle performance ? La notion de performance est liée à une compétence par rapport à une tache donnée. Sur 1,5 million de personnes reconnues handicapées en France, 18% nécessitent un aménagement de leur poste de travail et seulement 2% sont en fauteuil.

 

Ce n’est pas à l’entreprise de savoir comment aménager le poste de travail, car la personne handicapée sait mieux que quiconque comment se débrouiller avec son handicap.

 

On peut aussi transformer la contrainte du handicap en performance.

 

Une société de réseau électrique a embauché une personne sourde pour réparer les installations électriques perchées en haut des poteaux. Pour communiquer avec les personnes au sol, l’entreprise a mis au point un petit boitier avec indications lumineuses. Et ce système est tellement performant, puisqu’il évite de crier les indications, qu’il a été finalement étendu à l’ensemble des techniciens.

 

Pour mémoire, la télécommande de la télévision a d’abord été inventée pour des personnes qui ne pouvaient se déplacer. Et finalement, elle a été très appréciée des personnes valides !

 

À noter aussi que le handicap est parfois source d’exemplarité. Des études sur des groupes de travail qui avaient intégré une personne handicapée, ont montré que l’équipe est souvent plus productive et moins sujette à l’absentéisme. Car une personne handicapée, ça booste. On se dit, « Si je m’absente pour un simple rhume alors que lui, handicapé, vient tous les jours bosser, il y a quelque chose qui ne va pas. Donc moi aussi, je fais plus d’efforts ».

 

En conclusion, je dirais que ce qui est réalisé en faveur de l’intégration des personnes handicapées, permet de recentrer l’entreprise sur « l’humain ». Les employés ne sont pas que des unités de rendement, l’intégration d’une personne handicapée va permettre de mieux se parler, d’être plus cohérent. À condition de casser les codes, de libérer les a priori. Et de permettre ainsi à la personne handicapée de mieux s’épanouir. Ensuite, c’est comme tout le monde, si la personne est bien dans son entreprise, elle deviendra plus performante. Intégrer une personne handicapée dans l’entreprise permet non pas de mettre un chiffre dans un quota, mais d’afficher une ambition ».