Qu’est-ce que la fracture numérique ?
Laurence Louatron : Il n’y a pas une fracture mais des fractures numériques qui sont liées à la génération à laquelle on appartient. La fracture numérique est la conséquence du développement très rapide des différentes technologies utilisées dans le secteur du numérique. Une personne peut être up-to-date (dans le coup) à un moment donné et, 18 mois après, si elle n’a pas la capacité à chercher et renouveler d’elle-même ses compétences, elle peut se retrouver en difficulté. La fracture numérique existe aussi dans les entreprises qui n’ont pas le temps d’évoluer alors qu’il faut être en veille permanente.
Lucie Martins : Elle correspond au fait que toutes les personnes n’aient pas le même accès aux outils numérique. Pour les chercheurs d’emploi, il s’agit d’outils pour postuler, job board, réseaux sociaux pour valoriser son profil. Pour les Salariés, on peut vite ne plus être opérationnels sur les outils de l’entreprise. Par exemple, une entreprise qui passe au bulletin de salaire numérique, si personne n’est formé, pour enregistrer son salaire sur son ordinateur et imprimer – tout le monde n’a pas d’imprimante – on peut vite se retrouver en fracture numérique. Pour un sénior, il peut être en difficultés quand il s’agit de faire sa déclaration d’impôts sur internet
Quelles en sont les conséquences ?
Laurence Louatron : On peut perdre pied dans la société, au travail, dans sa vie quotidienne. A moyen terme, on peut se faire exclure. Pour les entreprises, se pose la question de la concurrence. Elles peuvent aussi se retrouver vite en difficulté, surtout si elles ciblent les nouvelles générations.
Lucie Martins : Des chercheurs d’emploi peuvent passer à côté d’offres et d’opportunités d’emploi. Pour un salarié, cela freine son évolution. Par exemple, chercher de la formation, tout se fait par internet : le CPF par exemple est un enregistrement en ligne. Il n’y a plus de papier.
Que proposez-vous pour lutter contre cette fracture numérique ?
Laurence Louatron : En direction des jeunes qui veulent travailler dans le numérique, l’action Tremplin Numérique menée par l’Ecole Centrale de Nantes en partenariat avec Pôle emploi leur permet d’être accompagnés et formés. S’ils n’ont pas d’appui dans ce secteur très vaste, ils peuvent avoir des difficultés à identifier vers quelles formations se tourner concernant les métiers du numérique. Ce dispositif va aider ces jeunes âgés de 18 à 30 ans, de niveau bac ou bac+1 dans des domaines scientifiques et ayant une appétence pour le numérique, d’acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour intégrer un contrat de professionnalisation ou une Préparation Opérationnelle à l’Emploi (POEC) dans le secteur du numérique. Les formateurs doivent développer des pédagogies adaptées à ces publics hétérogènes. Pour les entreprises, nous pouvons former, chercher et mettre à leurs dispositions nos connaissances et compétences afin de les aider à recruter, former, évoluer.
Lucie Martins : Pour les chercheurs d’emploi, la Fondation Agissons pour l’Emploi à Nantes les met en relation avec les entreprises, nous faisons l’intermédiaire entre les 2. Par exemple, pour la formation des développeurs web que nous proposons en contrat de professionnalisation, pour les seniors ou candidats ayant un niveau inférieur au Bac, nous argumentons auprès des entreprises pour qu’elles recrutent différemment. Sur ces positionnements, nous avons de bons taux de placement, notre sélection donne une part importante au savoir être. Par ailleurs, nous travaillons sur des modules de formation, comme Tremplin, qui permet à des chercheurs d’emploi éloignés du numérique d’être sensibilisés aux nouveaux outils : ateliers CV en ligne, job board, valorisation de son image à travers les réseaux. On travaille aussi avec la Maison de l’Emploi sur la promotion des DJA- Digital Job Ambition – qui aide une promotion d’une vingtaine de chercheurs d’emploi d’accéder à des outils : ateliers, work shop, outils pour optimiser sa recherche d’emploi.